« Nous voulons lancer le premier foie gras sans animaux sur le marché »

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Et si l’agriculture cellulaire offrait également une alternative au gavage ? C’est le pari de Peace of Meat, une start-up belge derrière le projet « Foieture ». Lancée en 2019 en collaboration avec la KUL et une poignée d’industriels, l’entreprise tente de produire du foie gras sans gavage et sans abattage… à partir de cellules souches. Entretien avec Eva Sommer, directrice scientifique de Peace of Meat.

Pourquoi Peace of Meat se concentre-t-elle sur le développement du foie gras sans abattage ? L'industrie de la viande n'a-t-elle pas besoin d'alternatives plus urgentes ?

Pour développer la viande de culture, nous nous basons sur une technologie qui existe déjà aujourd’hui, c’est-à-dire la technologie des cellules souches et de la médecine régénérative, qui permet par exemple de réparer la peau en cas de brûlure.

Trouver une alternative aux cellules hépatiques présentes dans le foie gras nous semble à portée de main. La vraie viande, quant à elle, est bien plus complexe à produire... Au cours des quatre prochaines années, nous allons nous concentrer principalement sur les échafaudages sur lesquels les cellules du foie de canard peuvent se développer. Ces connaissances nous aideront par la suite à passer à la production de viande d’élevage. Le foie gras sans animaux n’est donc pas notre unique objectif, seulement une première étape.

Quelle échéance visez-vous pour lancer du foie gras sans animaux dans les supermarchés ?

Nous disposons déjà de toute la technologie nécessaire. À partir de janvier 2020, nous travaillerons sur l’augmentation des capacités de production. En parallèle, d’autres recherches dans le domaine biologique seront menées, comme le développement de lignées cellulaires qui fourniront les cellules du foie gras. Nous comptons achever la phase de recherche d’ici trois ans pour passer directement à la conception du produit. Nous ambitionnons de commercialiser le premier foie gras sans animaux d’ici 2023.

Nous disposons déjà de toute la technologie nécessaire. Nous ambitionnons de commercialiser le premier foie gras sans animaux d’ici 2023.

Eva Sommer
directrice scientifique de Peace of Meat

Dans le cadre de votre projet « Foieture », vous travaillerez avec plusieurs partenaires du secteur alimentaire. Que reste-t-il à faire en dehors de la culture cellulaire ?

Peace of Meat se concentre essentiellement sur les cellules, le milieu nutritif permettant leur croissance et l’augmentation des capacités de production. L’Université catholique de Louvain (KUL) est le leader mondial de la recherche sur les cellules souches : il serait donc dommage de ne pas tirer profit de leur expertise. L’usine pilote de Bio Base Europe à Gand est, quant à elle, spécialisée dans la technologie d’upscaling. Enfin, il y a Nauta et le groupe Solina. Nauta est un producteur de pâté : les avantages de leur collaboration se passent d’explications. Solina se concentrera quant à elle sur l’étude du comportement du consommateur. Nous formons donc une équipe opérationnelle rassemblant plusieurs domaines d’expertise. Cela rend nos objectifs d’autant plus atteignables.

Le gouvernement flamand financera vraisemblablement votre projet. Quelles ont été les premières réactions quand vous avez présenté le projet ?

C’est GAIA qui nous a présenté à Flanders Food, qui assurera la coordination et le suivi du projet de foie gras sans animaux. En effet, les bénéfices du projet d’aide au développement de la viande de culture ont été très vite reconnue en Flandre. Après tout, la région concentre une quantité incroyable de connaissances sur les technologies alimentaires. Il s’agit simplement de trouver les bonnes personnes avec qui travailler. La viande de culture est un train qu’il ne faudra pas manquer. Grâce à GAIA et à Flanders Food, la Flandre deviendra productrice de viande cultivée.